Bangui, 21 Décembre – Leila Zerrougui, la Représentante spéciale pour les enfants et les conflits armés, Adama Dieng, le Conseiller spécial pour la prévention du génocide et Nancee Oku Bright, représentant la Représentante spéciale sur la violence sexuelle dans les conflits appellent les autorités de la République centrafricaine, les collectivités locales et la communauté internationale à prendre des mesures d’urgence pour empêcher le pays de sombrer dans un conflit sectaire à grande échelle et à protéger la population civile des atrocités en cours, particulièrement les femmes et les enfants.

Avec en toile de fond l’attaque du 5 décembre dernier dans la capitale, et les actes de représailles qui ont suivi, faisant des centaines de morts, les trois représentants de l’ONU se sont rendus à Bangui et Bossangoa pour évaluer l’impact de la crise qui frappe le pays depuis la fin de 2012 ainsi que la situation sécuritaire, humanitaire et des droits humains. Ils ont rencontré le chef de la transition, le Premier ministre et le Conseil national de transition, le corps diplomatique, des chefs religieux, la société civile, des groupes de femmes, des victimes de violations de droits humains, la communauté humanitaire et les fonctionnaires des Nations Unies qui travaillent dans le pays.

Les affrontements entres des éléments armés, particulièrement des ex-Séléka et anti-Balaka, ont entravé la cohésion sociale et incitent à la haine entre les deux communautés. Les représentants de l’ONU sont alarmés par les nombreux rapports d’attaques et d’actes de représailles contre la population civile, perpétrés principalement pour des motifs religieux.

« Compte tenu de la gravité des violations qui se poursuivent en toute impunité, la RCA pourrait devenir le théâtre de crimes atroces. Pour éviter le pire des scénarios, il faut prendre des mesures urgentes pour arrêter la violence et les responsables doivent répondre de leurs actes devant la justice », a déclaré Adama Dieng.

Depuis le début du conflit, les enfants du pays sont tués, mutilés, recrutés, victimes de violence sexuelle et utilisés par des groupes armés. Ils sont contraints d’abandonner leurs foyers, dans certains cas, séparés de leurs familles. Les écoles ont été pillées, les professeurs victimes de violences et les salles de classes occupées par des groupes armés. L’UNICEF estime que 2,3 millions d’enfants sont affectés par la crise, dont des milliers recrutés ou re-recrutés par des groupes armés.

« Rien ne peut justifier de négliger les enfants de la République centrafricaine. Je tiens à souligner l’engagement de la communauté internationale qui a déployé des troupes, soutient la Mission de l’Union africaine et fournit de l’aide humanitaire, mais les besoins sont énormes. Nous devons protéger les enfants de la violence, réunifier les anciens enfants soldats avec leurs familles, renforcer les mécanismes de surveillance et de rapport de communication des violations graves des droits de l’enfant et s’assurer que les enfants aient accès à l’aide humanitaire et à l’éducation en toute sécurité », a déclaré Leila Zerrougui.

Durant une rencontre avec les trois représentants des Nations Unies, Michel Djotodia, le chef de la transition s’est engagé à permettre un accès régulier et sans entraves aux sites de cantonnement du pays afin que les enfants dans les rangs de l’ex-Séléka puissent être remis à l’UNICEF et réunis avec leurs familles.

« Libérer les enfants est une étape cruciale, a déclaré Leila Zerrougui. J’appelle la communauté internationale à soutenir les autorités centrafricaines pour mettre en œuvre un programme de désarmement, démobilisation et réintégration adapté aux besoins des enfants. »

De plus, la Représentante spéciale souligne l’importance de développer des modalités précises pour séparer les enfants associés aux groupes armés et les remettre à l’UNICEF et au Bureau intégré des Nations Unies pour la consolidation de la paix en République centrafricaine (BINUCA).

Avec l’insécurité généralisée qui a contraint des centaines de personnes à quitter leur foyer, le système des Nations Unies, en collaboration avec les ONG partenaires, intensifie ses efforts pour fournir un soutien d’urgence aux personnes déplacées à travers le pays, ainsi qu’aux réfugiés du Soudan et de la République démocratique du Congo (RDC) vivant en RCA, ainsi qu’à ceux qui ont fui vers la RDC et le Cameroun.

« Le conflit et les déplacements ont accru la vulnérabilité des femmes et des enfants face à la violence sexuelle. Je suis profondément préoccupée par le fait que dans cet environnement volatile, les viols, mariages forcés, mutilations et autres actes graves de violence sexuelle contre les femmes et les enfants continuent d’être signalés, a déclaré Nancee Oku Bright. En Décembre 2012, lors d’une visite en RCA de la Représentante spéciale du Secrétaire général sur la violence sexuelle dans les conflits, des accords ont été signés entre l’ONU et les autorités nationales pour lutter contre la violence sexuelle liée aux conflits. Ces engagements sont encore plus importants aujourd’hui. Toutes les parties du conflit doivent cesser les violations, tandis que les partenaires humanitaires doivent également assurer l’accessibilité aux services médicaux et au soutien essentiels pour les survivants de violence sexuelle. »

Les priorités aujourd’hui sont de mettre fin à la violence, désarmer les combattants, créer un environnement sûr et réaliser des progrès dans le processus de transition politique du pays. Mme Zerrougui, M. Dieng et Mme Bright soulignent que pour ramener la paix et la stabilité dans le pays, il est essentiel de renforcer les moyens et les ressources disponibles pour la BINUCA et le système des Nations Unies. Ceci permettra d’organiser une réponse à la crise adéquate et efficace. Il faut aussi rétablir la justice pour que les auteurs de violations graves des droits de l’homme soient tenus responsables de leurs crimes.